L’orchestre des doigts
Tout au long de l’histoire de l’éducation pédagogique des sourds, on a toujours cherché à déterminer quelle était la méthode la plus appropriée. “L’Orchestre des doigts” dessine à travers 4 tomes le parcours d’un homme qui a consacré sa vie à l’enseignement pour les sourds au Japon.
Bande dessinées de Yamamoto OSAMU.
Editions Milan, 4 tomes (2006-2007)., 11€ par tome
Tout au long de l’histoire de l’éducation pédagogique des sourds, on a toujours cherché à déterminer quelle était la méthode la plus appropriée. “L’Orchestre des doigts” dessine à travers 4 tomes le parcours d’un homme qui a consacré sa vie à l’enseignement pour les sourds au Japon.
Osaka, 1914. Ayant dû renoncer à des études de musique, Takahashi Kiyoshi accepte d’enseigner dans une école pour sourds-muets et aveugles. Il découvre alors la langue des signes qui donne naissance à “l’orchestre des doigts”. à chaque signe correspond en écho une note, le professeur se fait chef d’orchestre. Cette douce symphonie sera déchirée de heurts et d’une double confrontation. Confrontation entre les enfants sourds, leurs parents ou la société. Car l’auteur, Osamu Yamamoto, poursuit son récit sur les sourds en le mêlant toujours intimement à l’histoire générale du Japon au début du XXème siècle. Confrontation entre les deux méthodes, gestualiste et oraliste, afin de trouver la meilleure “voie” au travers d’événements historiques et d’émotions humaines. Dans son ensemble, l’ouvrage invite le lecteur à balayer le spectre de ces confrontations au cours d’un parcours de vie. C’est en effet à la force de conviction d’un homme qu’en appelle l’auteur pour faire passer le message d’un choix possible d’une “éducation adaptée aux besoins de chaque élève pour qu’aucun ne soit laissé derrière”.
Il ne s’agit pas seulement de l’histoire inspirée d’une vie entière dédiée à l’éducation des sourds. Il est aussi la mise en scène sincère de l’éveil de tous ceux qui oeuvrent pour que les sourds parviennent à “entendre” la musique du langage, fut-il parlé ou signé. Enfin, il souligne l’enjeu pour des sourds de pouvoir saisir le sens et la cohérence de ces notes. Que l’on soit en accord ou non avec les idées présentées, l’intuition lumineuse reste cette possibilité pour tous d’accéder à la beauté musicale du langage. Les masques, les préjugés, les peurs tombent devant cette symphonie qui ouvre un nouveau champ et parvient à exprimer la vérité profonde de l’être. Elle nous est ici rendue “visible” et émotive par le dessin du manga, elle nous est jouée comme une nécessité vitale et une expérience humaine fondamentale, de celle qui ouvre les coeurs. Vision audacieuse ? Peut-être, mais à un certain degré d’“entendement” (au sens de raisonnement) cette audace est légitime. Elle appelle à garder l’espoir en ce chemin de vie d’un homme qui arrive peu à peu, au fil de sa vie, à établir un lien intense entre la musique du langage et les sourds, dépassant ainsi le paradoxe pour un dialogue permanent.
V. L-C