Des explications simples sur des notions ou des sigles fréquemment rencontrés dans le domaine de la surdité.
L’audiométrie est l’étude et la mesure de l’audition.
L’audioprothésiste est la personne qui sera chargée de vous proposer l’appareillage le mieux adapté à la surdité de votre enfant et qui en assurera les réglages et la maintenance.
Pour chaque fréquence on mesure l’intensité à partir de laquelle le sujet perçoit le stimulus (seuil d’audition).
Pour un sujet entendant, le seuil d’audition est par convention fixé à 0dB.
L’audiométrie permet également d’établir le seuil de douleur pour chaque fréquence afin d’adapter au mieux les réglages de l’appareillage.
Des courbes audiométriques (audiogrammes) seront établies par l’audioprothésiste mais également par le médecin ORL qui suit l’enfant.
Quand il s’agit de tester l’audition d’un bébé, l’audiométrie classique n’est pas adaptée.
Comment en effet demander au bébé de nous dire s’il entend ou n’entend pas ?
On a alors recours à des examens dits « objectifs » dans la mesure où ils ne nécessitent pas la participation active de l’enfant. Les examens pratiqués permettent d’enregistrer les réponses nerveuses à un stimulus sonore envoyé au tympan ou à la cochlée.
Il s’agit des PEA (Potentiels Evoqués Auditifs) pratiqués le plus souvent sous simple sédatif et plus rarement sous anesthésie. Dès que l’enfant est à même de manifester par un geste ou une réaction le fait qu’il perçoit le stimulus sonore, des examens subjectifs peuvent être pratiqués.
Il s’agit dans un premier temps de tests utilisant l’orientation conditionnée : l’enfant se tourne vers la source sonore où on lui montre en guise de récompense une image ou un petit film. Lorsque son âge le permet, l’enfant sera invité à appuyer sur un bouton dès qu’il perçoit le son, bouton qui déclenche une animation (train par exemple).
Plus tard on pourra utiliser l’audiométrie classique.
On distingue l’audiométrie tonale et l’audiométrie vocale.
L’audiométrie tonale
L’audiométrie tonale établit une mesure quantitative de l’audition pour chaque oreille.
On envoie un stimulus sonore calibré en fréquence et on augmente l’intensité jusqu’au moment où l’enfant manifeste le fait qu’il a entendu. Le stimulus sonore peut être envoyé par voie aérienne (avec casque ou en champ libre) ou par voie osseuse (un vibrateur est appliqué sur l’os derrière le pavillon de l’oreille).
Les résultats de l’audiométrie sont portés sur un tableau appelé audiogramme.
Sur la ligne horizontale sont inscrites les fréquences et sur la ligne verticale les intensités. Pour chaque fréquence testée, on marque d’un point l’intensité qui a été nécessaire pour que l’enfant perçoive le son. Lorsqu’on relie tous les points, on obtient la courbe du sujet correspondant à son seuil d’audition.
L’audiométrie vocale
L’audiométrie vocale s’adresse aux enfants qui possèdent déjà suffisamment de vocabulaire. Elle permet une mesure qualitative de l’audition. On prononce des mots (listes de mots étalonnées) que l’enfant doit répéter. Les altérations phonologiques sont relevées et on obtient un pourcentage d’intelligibilité.
Les degrés de surdité
Pour déterminer le degré de surdité, d’un enfant, on s’intéresse uniquement à l’oreille la moins sourde.
Dans le cas des audiogrammes que vous trouverez dans le chapître réservé à l’audiométrie, il s’agit de l’oreille droite. On fait ensuite la moyenne des pertes sur les fréquences 500, 1000 et 2000 Hz. On obtient donc : (60 + 80 + 100) / 3 = 80 dB.
On se reporte au tableau du BIAP (Bureau International d’Audiophonologie) :
– Audition normale : Déficience inférieure à 20 dB
– Déficience auditive légère : Déficience comprise entre 20 et 40 dB
– Déficience auditive moyenne : Déficience comprise entre 40 et 70 dB
– Déficience auditive sévère : Déficience comprise entre 70 et 90 dB
– Déficience auditive profonde : Déficience supérieure à 90 dB (on distingue 3 sous-catégories de surdités profondes : type I, II et III)
Surdité et audiogrammes
Nous avons parlé au cours de ce chapitre des différents degrés de surdité. La tentation est grande pour les parents de comparer le niveau de langage de leur enfant avec celui d’un enfant ayant un audiogramme identique. Cette comparaison enfant à enfant est impossible. A cela plusieurs raisons :
– Le degré de surdité est-il réellement le même (la différence est très importante entre un enfant qui présente une surdité profonde type I et un autre dont la surdité est également profonde mais de type III) ?
– Quel est le degré d’investissement de chaque famille auprès de son enfant ?
– Quelle est la récupération prothétique de chacun ?
– Quelles sont les capacités d’apprentissage de chacun ?
– Est-on sûr qu’il n’y a aucune différence sur le plan de la qualité des perceptions ?
– Etc…
De nombreux facteurs intrinsèques ou extrinsèques influent sur le développement langagier. Chaque enfant doit être pris pour lui même et, au delà d’une évaluation statique et normative, il me semble plus judicieux de procéder régulièrement à une évaluation dynamique visant à déterminer les progrès réalisés.
Ils peuvent fonctionner dans les locaux d’une consultation hospitalière, d’une consultation de protection maternelle et infantile, d’un dispensaire d’hygiène mentale, d’un centre médico-psycho-pédagogique ou d’un établissement habilité à recevoir des enfants d’âge préscolaire atteints de handicaps sensoriels, moteurs ou mentaux.
Ils peuvent être spécialisés ou polyvalents avec des sections spécialisées. Les CAMSP doivent disposer d’une équipe pluri-disciplinaire, dont obligatoirement un médecin pédiatre et un médecin qualifié en psychiatrie de l’enfant et dans le cas d’un centre d’audiologie infantile, d’un médecin ORL qualifié en audiophonologie.
Ces centres exercent aussi, soit au cours des consultations, soit à domicile, une guidance des familles dans les soins et l’éducation spécialisée requise par l’état de l’enfant. Leur budget de fonctionnement est assuré par une dotation globale versée par 80 % par l’Assurance Maladie et pour 20 % par le département dans le cadre de la Protection Maternelle Infantile(PMI).
Ceci peut permettre de prendre en charge des frais tels que interprètes pour parents étrangers ou pour parents sourds. La prise en charge des transports (hors dotation globale) relève de la décision des médecins-conseils du service médical.
Les enfants peuvent être orientés vers le CAMSP par un médecin, la PMI, un service hospitalier. La prise en charge ne relève pas de la décision de la CDES.La procédure d’entente préalable auprès de la Caisse primaire d’assurance maladie est obligatoire à compter de la 1ère séance.
Il existe une trentaine de CAMSP spécialisés pour l’accueil des enfants sourds, les uns créés au sein d’établissements spécialisés [par exemple l’Institut Paul Cézanne de Fougères (35) ou l’Institut de Jeunes Sourds de la Malgrange (54)], ou au sein de services hospitaliers ORL, par exemple au CHU de Bordeaux, Tours, Marseille, Nantes…
Texte de référence : Décret n° 76 – 389 du 15 avril 1976, annexe XXXII, brochure JO 1064
ANNEXE XXXII bis Annexe XXXII bis ajoutée par le décret n° 76-389 du 15 avril 1976 au décret n° 56-284 du 9 mars 1956
La loi du 2 janvier 2002 de modernisation sociale prévoit l’obligation pour les services et établissements médico-sociaux de fournir aux usagers un livret d’accueil qui décrit le projet de l’établissement.
Oralisme
Le modèle, dans cette option, est l’enfant entendant dont on cherche à suivre au plus près le développement linguistique et cognitif. L’audition est stimulée de manière intensive et le langage oral est utilisé comme seul moyen de communication et d’apprentissage.
Cette option qui était la norme, en France, jusqu’aux années 1970, se comprenait pour les surdités légères, moyennes et même sévères. Avec les surdités profondes, elle aboutit à des réussites remarquables, mais aussi à beaucoup d’échecs et de souffrances psychologiques.
Elle a donc été progressivement abandonnée au profit d’options éducatives bimodales ou bilingues.
Elle est en passe de redevenir d’actualité en raison des progrès technologiques : aides auditives numériques et implants cochléaires très précoces, qui améliorent considérablement l’apport auditif y compris pour les surdités profondes.
Elle va de pair avec l’intégration en milieu ordinaire avec soutien d’orthophonistes en libéral ou de services de soutien à l’intégration.
Méthodes compatibles :
Méthode verbo-tonale, méthode de lecture Borel-Maisonny
Méthodes mixtes
L’objectif est toujours de doter l’enfant sourd du français oral et écrit, mais l’importance de mettre en place une communication précoce parents-enfant, les limites de la lecture labiale pour structurer une langue riche, les dégâts psychologiques qu’a pu faire l’oralisme en ne mettant l’accent que sur la déficience et le manque, ont amenés la plupart des équipes à ajouter des compléments visuels aux apports auditifs: LPC, Français signé, Langue des Signes.
Oral + LPC
Les promoteurs de cette option se situent dans le courant oraliste.
Le LPC pratiqué par les parents précocement avec leur enfant sourd met celui-ci dans un “bain de langage” auditif et visuel, qualitativement proche de celui que reçoit l’enfant entendant.
Exemples : Institut du Bruckhof (Alsace), CODALI ( Paris).
Oral + FCSC
Mais le LPC ne concerne que la réception de ce qui est dit et pas l’expression de l’enfant sourd. Soucieuses de donner à l’enfant très jeune un moyen d’expression naturel et gratifiant, certaines équipes proposent d’utiliser des systèmes combinés LPC + Langue des Signes (FCSC) mais l’objectif reste de parvenir à une maîtrise du français oral et écrit identique à celle des entendants.
Exemples : Centre Comprendre et Parler (Bruxelles), SSEFIS (Nantes).
Bilinguisme
Sous ce terme, on trouvera deux types d’approches.
La première considère que l’objectif est de donner à l’enfant sourd deux langues : le français oral et écrit et la LSF , afin qu’il se sente à l’aise dans le monde des sourds comme dans celui des entendants. C’est l’objectif qu’affichent la plupart des établissements en France, mais selon les lieux les moyens mis en œuvre pour parvenir à la maîtrise de chacune des deux langues seront très différents.
Pour aider à y voir plus clair, on peut dire que :
– si l’équipe ne comprend pas un ou plusieurs intervenants sourds, les signes sont plutôt utilisés comme des aides à la communication (Français signé) que comme la découverte d’une véritable langue
– si l’équipe n’encourage pas à l’utilisation du LPC ou du FCSC (cours pour les parents, pratique du code par les intervenants), c’est l’acquisition du français qui risque d’être sacrifiée au profit de la langue signée.
Exemples : CEOP (Paris), CESDA (Montpellier), CESDA (Toulouse)
La deuxième approche bilingue est plus radicale et le bilinguisme est ici : LS et Français écrit.
Cette option considère que la LSF, langue naturelle de l’enfant sourd, doit être aussi la langue d’enseignement et d’acquisition des connaissances. Le français écrit est abordé comme une langue seconde. L’acquisition de la lecture fait appel à la méthode globale. Le français oral n’est pas considéré comme indispensable et ne sera encouragé que chez les enfants qui montrent une réelle appétence pour la communication orale.
Les classes bilingues sont implantées dans des écoles ordinaires. L’enseignement est le fait de d’enseignants sourds ou entendants, maîtrisant la Langue des Signes.
Exemple : Laurent Clerc
Le dépistage d’une affection a pour but de repérer dans une population, la totalité de ceux qui sont atteints de l’affection considérée. Le dépistage est d’autant plus efficace que les nombres de “faux positifs” (patients dépistés alors qu’ils ne sont pas atteints) et de “faux négatifs” (patients non dépistés alors qu’ils sont atteints) sont faibles.
Les tests de dépistage des surdités de l’enfant dépistent la surdité quelle que soit son origine : transmission ou perception. Une fois dépisté, l’enfant doit être orienté vers un lieu de diagnostic qui confirmera la réalité de la perte auditive et précisera s’il s’agit de surdité de transmission ou de perception (service hospitalier ORL, CAMSP, médecin ORL libéral pratiquant des explorations fonctionnelles).
Jusqu’à présent, les carnets de santé prévoient des tests de dépistage à la maternité, à 4 et 9 mois, à 24 mois et chez l’enfant scolarisé.
Le dépistage systématique de la surdité en maternité – qui pourrait entrer en vigueur prochainement – n’est en France actuellement le fait que :
– des naissances ” à risques ” : prématurité, causes infectieuses pendant la grossesse, à la naissance ou post-natales, médicaments ototoxiques, traumatismes, cas de surdités dans la famille, etc.
– quelques lieux expérimentaux : Picardie, Eure, CHU de Tours, CHU de Bordeaux
Ce sont les parents ou l’entourage proche qui souvent sont les premiers à avoir un doute sur l’audition de leur enfant. Ni les médecins généralistes, ni les pédiatres, ni même les médecins ORL ne sont suffisamment attentifs aux signes d’alerte de la surdité de l’enfant.
REFERENCES
– Article de M. Jacques Leman
– Article du Pr Garabédian
– Recommandation 12-14 du BIAP
L’annonce du diagnostic : première étape de la découverte du handicap
C’est au médecin audiophonologiste que revient la lourde et délicate tâche d’annoncer aux parents la surdité de leur enfant.
Au moment de l’annonce :
– Quel est le savoir du médecin ?
– Quelles sont ses interrogations et les limites de son savoir ?
– Que peut-il et doit-il dire aux parents ? – Qu’attendent les parents ? – Comment réagissent-ils ?
– Quels sont les éléments contextuels qui modifient l’annonce du diagnostic ?
– Quelle part le médecin audiophonologiste prend-il au projet de rééducation et donc au pronostic d’évolution ?
– Comment enfin évolue cette annonce en fonction des progrès scientifiques ?
Autant de questions auxquelles je vais tenter de répondre à partir de mon expérience de médecin audiophonologiste.
Le savoir du médecin
Faire un diagnostic, c’est déterminer la nature de la maladie dont est atteint le sujet.
En ce qui concerne la surdité une série d’examens subjectifs et objectifs est effectuée.
Un bilan complet permet dans la très grande majorité des cas de connaître le type de surdité, perception ou transmission, atteinte périphérique ou centrale, et le degré de surdité avec une certaine approximation lorsque l’enfant est très jeune.
Dans les quelques cas exceptionnels où une ambiguïté persiste sur l’un de ces points, des examens complémentaires sont à prévoir pour préciser le diagnostic dans les meilleurs délais.
Etiologie
Parfois le médecin connaît avec une quasi certitude la cause de la surdité. Dans certains cas, il a des présomptions ; mais souvent aucun élément ne permet d’étayer un diagnostic étiologique avant d’avoir engager un bilan complet.
Absence de traitement médical ou chirurgical
S’il s’agit d’une surdité de perception, il sait qu’actuellement aucun traitement médical ou chirurgical ne permet de guérir plus ou moins complètement le déficit auditif.
En cas de surdité de transmission due à des malformations de l’oreille moyenne, on peut espérer une amélioration partielle. Il en est de même lorsqu’une atteinte de l’oreille moyenne se surajoute à l’atteinte perceptive.
Mise en évidence de troubles associés
Certains troubles associés apparaissent précocement et le médecin peut les détecter. Ces troubles associés perturbent souvent l’évolution future de l’enfant et il faudra en tenir compte pour établir un pronostic. Certaines causes de surdité peuvent faire prévoir l’apparition ultérieure de difficultés surajoutées (fœtopathie à cytomégalovirus, par exemple).
Pronostic d’évolution
Le pronostic d’évolution du sujet dans les domaines de l’utilisation des restes auditifs avec appareillage, de l’acquisition d’un langage oral, des apprentissages scolaires, est impossible à établir au moment du diagnostic.
La transmission du savoir
Que dire aux parents ?
Le médecin doit faire part de toutes ses certitudes ; il doit affirmer l’existence du déficit auditif et préciser sur quels éléments il fonde son diagnostic afin que les parents n’aient pas de doute sur ses compétences et n’aient pas immédiatement le désir de faire contrôler le diagnostic.
Il doit préciser le degré de surdité et expliquer en détail ses conséquences sur la perception auditive en donnant des exemples concrets concernant les bruits environnants et la parole. Il doit être clair sur les possibilités (rares) et les impossibilités (dans la très grande majorité des cas) d’améliorer l’audition grâce à un traitement médical ou chirurgical.
Cette fermeté sur l’importance et l’irréversibilité de l’atteinte sert de tremplin pour insister sur la nécessité d’une prise en charge aussi précoce que possible.
A l’inverse, il faut avoir le souci de ne pas décourager les parents, de ne pas les mettre en situation d’impuissance, de leur donner suffisamment d’espoir pour adapter leur comportement quotidien aux besoins de l’enfant.
D’où le dilemme : dire la vérité sur le déficit et son caractère définitif mais donner des perspectives suffisamment optimistes pour dynamiser les parents et leur permettre d’être des éducateurs efficaces, voire enthousiastes.
Les attentes et les réactions des parents
La grande majorité d’entre eux sont entendants et n’ont jamais été confrontés au problème de la surdité.
Leur première réaction est l’incrédulité. Il est étonnant de constater que des parents qui avaient eu des doutes, qui avaient donné des exemples précis d’absence de réaction auditive de leur enfant essaient, lorsqu’ils ont confirmation de la surdité, de démontrer au médecin qu’il s’est trompé.
Demande de réparation
La deuxième question est de savoir si une guérison est possible. L’annonce de l’absence de thérapeutique est d’ailleurs considérée par certains comme une preuve de l’incompétence du médecin et provoque des ” consultations de vérification “.
Recherche de la cause
Puis selon les cas, viennent les questions concernant la cause de la surdité et parfois la responsabilité, d’un soignant, d’un membre de la famille, d’une déviance aux règles culturelles…
Certains souhaiteraient un bilan étiologique avant d’engager la rééducation.
Possibilité de réhabilitation
Enfin ils s’interrogent sur l’avenir de l’enfant : est-il appareillable? comment entendra-t-il avec ses prothèses? parlera-t-il? pourra-t-il aller à l’école avec ses frères et sœurs? sera-t-il un adulte autonome? quel métier pourra-t-il exercer ?
La question du mode de communication se pose rarement d’emblée.
Les parents ont souvent l’impression de comprendre leur enfant et d’être compris de lui.
Le médecin doit être à l’écoute des parents, les mettre à l’aise et se mettre à leur portée pour qu’ils s’autorisent à poser toutes les questions qui les préoccupent. Il doit répondre le plus clairement possible à leurs questions mais éviter d’anticiper celles qu’ils ne posent pas.
Elles pourront être abordées ultérieurement.
Il ne doit pas céder à la tentation de les rassurer à tout prix en leur donnant de fausses espérances mais doit leur montrer que l’avenir de l’enfant dépend essentiellement de leurs choix éducatifs, de leur disponibilité, de leur adaptation au handicap, de l’adéquation entre les capacités de l’enfant et le projet qui sera mis en œuvre.
Lors de cette première étape beaucoup de questions vont rester sans véritable réponse, beaucoup de réponses ne vont pas être entendues ou comprises par les parents.
D’autres rencontres sont à prévoir pour préciser le diagnostic, expliquer à nouveau. Les parents poseront de nouvelles questions après un temps de réflexion, de maturation et de découverte des conséquences de la surdité. Peu à peu un projet thérapeutique et éducatif se construit mais le médecin audiophonologiste n’est plus le seul interlocuteur des parents.
Le rôle de l’équipe pluridisciplinaire
La vision que le médecin a de la surdité est influencée par sa formation.
Pour lui, la surdité n’est pas une différence, c’est une déficience.
Le médecin constate un dysfonctionnement voire une destruction de l’organe sensoriel. Le plus souvent il connaît la localisation de la lésion. Cette surdité peut être consécutive à une maladie, comme une méningite ou une fœtopathie, ou encore à une anomalie génétique.
Des malformations peuvent être visibles sur le scanner. Il s’agit donc d’une pathologie.
Le diagnostic est bien celui d’une pathologie mais la thérapeutique n’est pas médicale
On va proposer :
– une réhabilitation fonctionnelle de l’audition grâce à un appareillage,
– une prise en charge éducative spécifique,
– et surtout des modalités particulières de communication (lecture labiale, langage parlé complété, français signé…), voire une langue différente, la langue des signes
C’est dire toute l’importance de l’intervention d’une équipe pluridisciplinaire entourant l’enfant et sa famille, comme au sein d’un CAMSP ou d’un SAFEP.
Si l’audiologiste est seul pour annoncer la surdité, par contre toute l’équipe est concernée par l’annonce de la “thérapeutique” ou plutôt les moyens à mettre en œuvre pour que l’enfant évolue favorablement.
L’enfant et sa famille pourront ainsi bénéficier d’approches diversifiées (pédiatre, psychologue, psychiatre, orthophoniste, enseignant, professionnel sourd, psychomotricien, assistante sociale, audioprothésiste…).
Chaque professionnel les guidera dans son domaine de compétences et le rôle de l’audiophonologiste devra donc être modulé en fonction de ses partenaires. Il va sans dire que la richesse de cette pluridisciplinarité ne sera optimale que si les discours sont cohérents et complémentaires, ce qui nécessite des échanges et des mises en concordance fréquentes entre les différents partenaires.
L’influence du contexte
Après avoir décrit les conditions générales de l’annonce du diagnostic il est nécessaire de pointer quelques cas particuliers.
Chaque enfant sourd avec son environnement familial est unique et différent des autres comme c’est le cas pour les entendants.
Le degré de surdité exagère encore ces différences puisque le projet que l’audiophonologiste commence à définir avec la famille est largement influencé par le pronostic de réhabilitation auditive. De multiples facteurs sont également à prendre en compte :
L’âge de l’enfant au moment du diagnostic
Plus le diagnostic est tardif, plus la prise en charge est urgente. La pression exercée pour des contacts rapides avec un audioprothésiste et avec des rééducateurs peut être mal ressentie par les parents qui ont besoin de temps pour accepter la surdité.
Parfois les parents se sont inquiétés depuis longtemps mais n’ont pas été entendus par les professionnels ou bien ont eu un parcours diagnostique très chaotique et leur disponibilité s’en ressent.
Enfin, il faut parfois rectifier un diagnostic erroné qui avait momentanément rassuré la famille.
Existence d’une surdité dans la famille
Lorsque les parents sont sourds l’acceptation de la surdité de l’enfant est en général beaucoup plus facile même si quelques uns manifestent une certaine déception et si d’autres sont désorientés par une différence de degré de surdité.
C’est parfois l’annonce d’une audition normale qui est mal ressentie par la famille.
La surdité d’un membre plus éloigné de la famille rend le handicap moins mystérieux et souvent plus facilement acceptable, surtout lorsque l’image du sourd connu est positive.
Par contre lorsqu’un deuxième enfant sourd naît dans une famille d’entendants le diagnostic est toujours un choc très douloureux même si les parents avaient pris le risque en toute connaissance de cause.
Existence de troubles associés
Annoncer un déficit auditif dans le cadre d’une pathologie beaucoup plus globale n’a pas le même impact.
Ce déficit peut être considéré par certains parents comme étant sans importance eu égard aux autres troubles (moteurs, intellectuels…) et risque de ne pas être pris en compte.
Parfois la famille rend la surdité responsable de tous les symptômes et se rassure en pensant qu’il s’agit d’un handicap moins lourd que celui qu’ils commençaient à appréhender.
Dépistage systématique
C’est ” un coup de tonnerre dans un ciel serein “. Si les parents n’avaient aucun doute auparavant ils refusent souvent le diagnostic et d’autres contrôles seront nécessaires avant qu’une prise en charge puisse débuter.
Le dépistage systématique néonatal pose le problème d’un diagnostic “hyper précoce” pouvant déstabiliser la relation mère-enfant, élément très préjudiciable à l’évolution future de l’enfant. Sa généralisation nécessiterait la présence de professionnels spécialement formés.
Langue parlée dans la famille
Annoncer un diagnostic de surdité et en expliquer les conséquences à une famille qui n’est pas francophone est un exercice bien délicat. La présence d’interprètes professionnels est rarement possible; la gestion des interprètes familiaux ou amicaux se révèle parfois difficile.
Disponibilité et implication des parents
Elle doit être évaluée le plus tôt possible pour proposer un projet durable. On évitera de culpabiliser les parents non disponibles, tout en leur faisant prendre conscience de l’importance de leur rôle. Favoriser et surtout provoquer le “sacrifice” d’un parent ou de la famille est souvent préjudiciable (arrêt d’une activité professionnelle, déménagement… pour l’enfant sourd).
L’influence des progrès scientifiques
Les progrès récents de la génétique et la nouvelle possibilité de réhabilitation des surdités profondes grâce à l’implant cochléaire ont également modifié le contenu des premiers entretiens entre le médecin et les parents d’un enfant sourd.
II peut être considéré comme un nouvel appareil de correction auditive pour les surdités les plus profondes.
Une information précoce des parents sur son existence est donc indispensable au même titre que celle concernant les autres moyens de réhabilitation de la surdité.
La précocité de cette information par un professionnel compétent nous semble indispensable pour éviter des informations erronées et la recherche de solutions en dehors de la prise en charge proposée.
Une grande prudence s’impose ; la mise en place de l’implant suppose un bilan médical approfondi puis un acte chirurgical qui demandent un grand investissement aux parents et peuvent donner l’impression que tous les problèmes seront résolus à l’issue de cette période. On court le risque de voir les parents attendre un miracle de cette nouvelle technologie et ne pas s’impliquer dans la rééducation quotidienne de leur enfant, en particulier la mise en place d’une communication adaptée.
Il s’agit donc de donner une information précoce qui n’est que le début d’une longue réflexion à mener avec les parents, jusqu’au moment où la décision sera prise de demander un bilan pré-implantation ou au contraire d’abandonner le projet.
Dans les deux cas des explications claires et des arguments justifiant la nécessité d’approfondir le bilan avant de prendre une décision devront être fournis aux parents.
La Génétique
La possibilité d’affirmer l’origine génétique d’une surdité est récente, en particulier pour les surdités isolées.
Un bilan génétique peut être effectué précocement.
Faut-il le proposer pour tous les enfants ou bien attendre la demande des parents ? Faut-il répondre immédiatement à la demande des parents, avec le risque de les rendre moins disponibles pour la rééducation, ou au contraire le différer ?
Autant de questions qu’il faudra traiter au cas par cas en fonction du contexte familial. Certaines surdités génétiques ont des caractéristiques particulières dont la connaissance est utile au suivi de l’enfant.
Exemples
Dans le syndrome de Pendred la surdité est souvent fluctuante. La méconnaissance des fluctuations peut provoquer des interprétations erronées des changements de comportement de l’enfant ; on les attribue à de l’inattention, à de la mauvaise volonté… Un traitement médical adapté permet d’obtenir quelques améliorations.
Dans le syndrome de Usher la surdité est associée à des troubles vestibulaires et à une rétinite pigmentaire.
Les troubles de l’équilibre peuvent être minorés grâce à une rééducation psychomotrice appropriée. Le suivi ophtalmologique va permettre d’évaluer avec précision les troubles visuels dont la rapidité d’évolution n’est pas prévisible et d’adapter la rééducation en conséquence.
Là encore se pose la question de savoir si les parents doivent être prévenus d’emblée de tous ces risques. Le médecin qui a un doute doit-il, dès le diagnostic, prescrire les examens qui permettront d’éliminer ou de confirmer les troubles visuels ?
Conclusion
Dans le cadre d’une surdité précoce de l’enfant, le diagnostic ne se limite pas à mettre en évidence une déficience auditive et à en déterminer le degré.
Le médecin audiophonologiste à qui incombe la tâche d’annoncer le diagnostic de surdité doit :
– avoir des certitudes mais en connaître les limites ;
– être à l’écoute des parents et ajuster son comportement en fonction de leurs demandes et du contexte ;
– se former aux découvertes scientifiques récentes, en informer les parents avec le maximum d’objectivité et en faire bénéficier les enfants lorsque c’est possible ;
– garder sa spécificité d’audiophonologiste mais s’assurer qu’un réseau de professionnels compétents se constitue autour de l’enfant et de sa famille pour leur assurer un suivi et un soutien pluridisciplinaires. Cette équipe pluridisciplinaire accompagnera la famille dans sa découverte du handicap et l’aidera à dépasser le souvenir souvent douloureux de la première annonce.
Docteur Denise Busquet – ORL Phoniatre
Entre 0 et 3 ans, les enfants peuvent être suivis par :
– un orthophoniste en libéral
– un CAMSP
– un SAFEP
Aider la famille à devenir efficace :
Rien n’est plus délicat que de faire découvrir aux parents les comportements indispensables aux apprentissages du premier âge, dont tant de choses vont dépendre. J’ai connu des mères qui ont mis des mois à se remettre d’une parole mortifère : le passage est souvent imperceptible entre responsabilité et culpabilité! Aider la famille à devenir efficace, c’est tout un art. C’est cet art qu’il faut transmettre : la LSF, la LPC, la verbo tonale, les aides auditives, la lecture labiale etc. ce sont des outils. Ils ne sont utiles que si on sait à quoi et comment ils servent”. Josette Chalude.
REFERENCES
– “Pour une entrée en communication de l’enfant sourd” : article de Mme Brigitte Collette paru dans “Rééducation Orthophonique” de juin 2000, n° 202.
– Actes du Colloque ACFOS III – Un projet pour chaque enfant sourd : enjeux et pratiques de l’évaluation. Extrait de l’article de M. Marc Marscharck “Regarder par delà l’évidence : évaluer et comprendre les élèves sourds dans leurs apprentissages”
– Rôle des intervenants : article de Mme Christine Lepot-Froment sur les principes de l’éducation précoce
– Le Centre Hanen de Toronto est une organisation caritative dont le but est d’aider les enfants ayant d’importants retards de langage.
Il a acquis une audience mondiale par la qualité de ses travaux. Il propose des formations pour orthophonistes au Canada et partout dans le monde, des programmes pour les familles ou les professionnels de l’enfance, des ouvrages.
Deux guides destinés aux parents sont disponibles en français :
– “Parler, un jeu à deux. Comment aider votre enfant à communiquer”. 1992 – 30 $ US
– “A vous de jouer et d’aider votre enfant à apprendre”, 1995 -18 $ US
Bien que ces ouvrages ne soient pas écrits pour les parents d’enfant sourds, ils sont bien connus des professionnels qui s’occupent d’éducation précoce de petits sourds. Le livre de A. Sanchez et M. Monfort (“Savoir dire : un savoir faire“) est très imprégné de la philosophie Hanen.
Le principe de la méthode Hanen est d’encourager la communication de façon indirecte en suivant “le chemin des trois A” :
– Accorder à notre enfant la possibilité de prendre les devants
– Adapter pour partager le moment
– Ajouter du langage et des expériences.
Ces livres sont abondamment illustrés de dessins et d’exemples de dialogues. Il est possible de commander et payer par carte bancaire via Internet, ces ouvrages: www.hanen.org au prix que nous indiquons ci-dessus, il faudra rajouter le prix du port, environ 10 $ US.
Créé à l’initiative de parents soucieux de jouer pleinement leur rôle de parents d’enfants sourds, le centre Comprendre et Parler de Bruxelles a toujours voulu donner une place prépondérante à la famille comme partenaire privilégié du développement affectif et linguistique, comme espace d’épanouissement et de développement de compétences.
Les limites de l’oralisme
En 1980, l’équipe du centre avait constaté les limites et les avantages consécutifs à 20 ans de pratique oraliste jointe à une pratique intensive de la méthode verbo-tonale. De nombreux jeunes sourds, au terme de leur scolarité, présentaient des difficultés inadmissibles compte tenu de l’ampleur des efforts réalisés par tous les partenaires impliqués : enfants, parents, professionnels. Les avantages de la méthode verbo-tonale (qualité de parole et de voix) paraissaient dérisoires voire futiles à côté des carences présentées par les jeunes sourds (isolement, troubles du comportement, illettrisme, difficultés de mémorisation et de conceptualisation…)
Le LPC
Le LPC, qui commençait à cette époque sa percée en France semblait pouvoir offrir une réponse valable à un certain nombre de problèmes et questions rencontrés : langue des parents entendants rendue visuellement accessible, importance donnée aux échanges naturels, développement des habiletés en lecture, connaissance approfondie du Français… Le LPC fut donc adopté comme outil d’acquisition de la langue parlée, langue majoritaire de la famille de l’enfant sourd ; il fut, à ce titre, fortement préconisé auprès des parents. Cependant la question de l’accès précoce à un système d’expression efficace et plaisant pour l’enfant ne s’en trouvait pas pour autant résolue. Le LPC ne permet pas, en effet, de garantir un accès précoce à l’expression de la langue parlée (par exemple entre 1 et 3 ans), rien ni personne ne pouvant, à priori, déterminer sans risque de se tromper, que l’enfant, même équipé d’un implant cochléaire, sera intelligible…un jour. Le LPC n’apporte donc pas forcément à l’enfant sourd un moyen d’expression adéquat, précoce et immédiat, avec pour conséquence possible un décalage ou un retard d’expression dans le cas où l’enfant n’est pas ou peu intelligible (Nash, 1973 ; Mohay, 1983, Ryalls, Auger & Hage, 1994). C’est la raison pour laquelle l’équipe du centre s’est tournée aussi vers le vocabulaire signé puisé dans la langue des signes.
Le Signe
Contrairement à l’opinion généralement répandue (Bates et al, 1983 ; Schwam, 1980), plusieurs études relèvent que, à part de rares cas d’isomorphisme visuel entre le signe et l’objet qu’il représente, le signe n’offre à l’enfant aucune voie d’accès direct ou indirect à la prise de sens (Meier, 1981, 1987). L’idée que le signe est facile à comprendre parce qu’il serait iconique (sens « transparent ») est naïve et non vérifiée.
Bien au contraire, l’analyse étymologique des langues des signes montre, universellement, une tendance à évoluer au fil des générations vers une opacité (sens caché) de plus en plus importante de la signification au profit de la formalisation (paramètres de formation des signes). Par contre, étant très tôt imitable ou reproductible par l’enfant, dès l’âge de 8-9 mois, le signe intéresse l’enfant (ex : « au revoir ») qui l’isole et le capte aisément dans une forme globale. Une explication possible de cet état de fait consisterait à dire que le vocabulaire signé (contrairement à la forme parlée) est plus facile à isoler ou à percevoir, notamment en tant que forme motrice imitable et utilisable par l’enfant.
Cette caractéristique fait de chaque item signé un élément de la plus haute importance. En effet, une fois qu’il a, d’un point de vue cognitif, établi le lien entre le signifiant (le signe) et le signifié (l’objet ou l’action qu’il représente), l’enfant peut exprimer manuellement/visuellement les concepts et s’insérer ainsi dans la conversation en tant qu’acteur de communication. Cette étape est fondamentale car l’enfant qui s’exprime (dans ce cas-ci au moyen de signes) permet aux parents de s’ajuster et d’offrir un message linguistique optimal tant en contenu qu’en degré de difficulté dans la zone de développement proximal propre à l’enfant (cf. Vigotsky). Bien sûr cela ne suffit pas, notamment lorsque des objectifs ambitieux sont poursuivis tels que l’acquisition de la lecture et de la forme écrite d’une langue parlée ou le développement de l’autonomie de communication dans une société majoritairement entendante.
Face à ces constatations de base, quelques postulats ont servi de catalyseur de changement pour l’équipe de Comprendre et Parler. Une démarche tout à fait particulière a en effet été adoptée à Bruxelles, sur base des 5 convictions suivantes:
- L’enfant sourd a le même potentiel linguistique que n’importe quel autre enfant. Dans cette perspective, il est de la responsabilité de chacun de tout mettre tout en oeuvre pour prévenir les déficits ou retards linguistiques consécutifs à la surdité.
- L’enfant sourd doit impérativement être exposé à une langue complètement accessible c’est à dire présentée visuellement et sous une forme complète.
- Une langue n’est pas seulement un système de communication ; c’est aussi un système linguistique complexe et formalisé entre humains qui obéit à un certain nombre de règles strictes qui doivent être respectées.
- Une première langue s’acquiert dans le cadre d’interactions ; il est donc indispensable de maintenir le cadre naturel des interactions avec le jeune enfant.
- La première langue doit toujours être la langue de la famille. Ce postulat est d’application, que les membres de la famille soient sourds ou entendants. Dans le cas de parents sourds pratiquant la LS, il leur est conseillé de l’utiliser avec l’enfant. Le LPC est introduit par l’équipe de professionnels. L’expérience montre que les enfants parviennent ainsi à un bilinguisme satisfaisant.
Le FCSC
Depuis 20 ans, dans le respect de ces 5 postulats, l’équipe du centre Comprendre et Parler utilise et préconise auprès des parents entendants un système appelé FCSC (Français Complet Signé et Codé) que l’on pourrait qualifier de « système visuel dynamique d’aide à l’acquisition d’une première langue parlée ». Le FCSC consiste à utiliser le LPC dans toutes les interactions avec l’enfant, tout en le ponctuant de signes empruntés au lexique de la langue des signes selon un processus adaptatif simple et rigoureux (voir encadré). FCSC et Français Signé Le FCSC n’a rien de comparable avec le Français Signé (souple ou strict) qui consiste, pour le locuteur, à prononcer des phrases en Français tout en s’accompagnant manuellement de signes et/ou de dactylologie.
On cerne maintenant bien les limites et inconvénients du Français Signé qui n’offre en aucun cas à l’enfant une présentation visuelle complète du français. L’enfant dispose, sous forme visuelle, d’un pidgin qui ne respecte pas les règles grammaticales de la langue de référence (ex : « nous dormons » est perçu visuellement sous forme de deux concepts : nous et dormir). L’enfant ne dispose donc d’aucune information concernant la forme phonologique (le mot « dormir » est constitué des syllabes DOR et MIR) ou la morphosyntaxe du français (la syllabe MON indique que c’est moi et les autres qui sont impliqués dans l’action de DOR/MIR). Tout au plus peut on dire qu’en Français Signé l’ordre du français est potentiellemt respecté, pour autant que le locuteur utilise le français signé dans sa forme stricte, ce qui se révèle épuisant… et rarement respecté.
FCSC et LPC
Dans le FCSC, tout au contraire, l’objectif est de passer le plus rapidement possible au LPC seul, garant d’un accès visuel à tous les composants du français, d’ordre phonologique et morphosyntaxique. On donne à l’enfant, dès la première phrase qui lui est adressée, tous les indices nécessaires à la construction de sa première langue, tout en se permettant une étape intermédiaire qui sera fonction de l’intelligibilité de sa parole. L’apprentissage du FCSC doit donc impérativement débuter par l’acquisition des clés du LPC. Une fois cette étape franchie, le locuteur, parent ou professionnel, insèrera des signes dans ses phrases codées.
De nombreuses familles se sont déclarées satisfaites de cette forme d’inclusion progressive des signes dans leurs messages, particulièrement compatible avec le stress et les premiers découragements qui entourent la période de découverte du handicap et le début de la prise en charge (ré)éducative.
Lorsque le FCSC est utilisé intensivement, il permet à l’enfant de passer d’une attention visuelle large stimulée par l’emploi de signes à une attention restreinte aux lèvres qui prononcent. L’utilisation du LPC pour les mots fréquemment répétés tels que les articles ou les prénoms des enfants permettent à ceux-ci de s’imprégner progressivement des clés.
Au départ, ils peuvent être plus attentifs aux mains qu’à la bouche et montrer une assimilation des clés du LPC à des signes sans rapport avec l’image labiale. A ce stade néanmoins, l’attention de l’enfant qui se porte sur le parent qui communique constitue un encouragement positif non négligeable pour l’adulte. Peu à peu, l’enfant découvre les correspondances main-bouche attachées au LPC et apprend à observer les lèvres. Il peut constater, parfois très précocement l’équivalence sémantique entre mot codé et mot signé, l’image labiale restant identique. Il manifeste alors explicitement la connaissance de cette double correspondance, par exemple en confirmant par un signe la compréhension d’un mot codé ou inversement.
Tout en maintenant toujours une image visuelle complète de la langue, le FCSC permet de doser le degré de difficulté selon les aptitudes personnelles de l’enfant liées à l’âge, l’importance de la perte auditive, la compétence linguistique ou expressive, etc. Le FCSC a maintenant largement fait ses preuves.
Dès que l’enfant a atteint une intelligibilité suffisante pour s’insérer dans des conversations avec son entourage parlant le français, le FCSC fait place au seul LPC et à ses nombreux avantages maintenant bien étayés par des recherches scientifiques. On constate, sans exception aucune, que dès que l’enfant peut exprimer un mot de manière intelligible, il abandonne spontanément la forme signée de ce mot en expression. L’objectif d’aboutir à une expression sans limite de l’enfant est donc atteint, d’abord en lui garantissant une expression signée, ensuite en lui permettant de développer une parole la plus intelligible possible, mais à son rythme et selon ses compétences
Les études de plus en plus nombreuses et publiées dans un cadre scientifique montrent que les enfants exposés au FCSC développent des compétences élevées en compréhension (Périer, Charlier, Hage & Alegria, 1990), en lecture (Leybaert et Lechat, 1998), en morphosyntaxe (Hage, 1995) et que les représentations des mots dans la tête des enfants sont complètes et isomorphes à celles des enfants entendants du même âge (Charlier et Leybaert, 2000). On constate aussi un impact non négligeable du système sur le développement des compétences cognitives telles que la mémorisation. Ainsi, des enfants exposés au FCSC développent-ils spontanément des mécanismes efficaces de mémorisation qui impliquent des représentations phonologiques de la langue française (Charlier, 1994). Ainsi se voit donc contournée voire résolue la problématique question de la mémoire verbale des enfants sourds, souvent décrite comme drastiquement déficitaire.
Oser passer au LPC
En conclusion, le FCSC est un outil puissant, qui a démontré ses effets sur le plan clinique et qui, fait important à nos yeux, répond aux besoins tant des enfants que des familles des enfants sourds. Ce n’est pas un outil de remédiation, c’est un outil catalyseur d’un développement naturel des compétences linguistiques des enfants sourds, dans le plaisir et la spontanéité. Un des écueils le plus courant du FCSC réside dans le fait que le locuteur ne « passe » pas au LPC. Et pour adopter le FCSC, il convient donc de ne pas oublier de s’attarder encore à une démarche : celle d’oser passer au LPC. Nombreux sont encore les utilisateurs du FCSC qui craignant de laisser l’enfant sans compréhension, voulant à tout prix offrir à l’enfant l’accès au sens du message, lui refusent l’étape de le laisser découvrir les clés du LPC. Ces personnes « s’attardent longuement à l’étape du signe ». Un minimum d’introspection est alors nécessaire pour pouvoir observer délibérément que l’utilisation excessive des signes est, dans ce cas, le reflet d’un manque de confiance que l’on ressent dans les capacités de l’enfant sourd.
REFERENCES
Centre Comprendre et Parler
1200-Bruxelles, Université Libre de Bruxelles
1050-Bruxelles – Belgique
Courriel : centrecp@tiscalinet.be ou brcharli@ulb.ac.be
Merci à Didier Férard, orthophoniste en libéral, qui nous a donné l’autorisation de reprendre des éléments de son site Internet.
L’implant cochléaire est un système qui s’affranchit totalement de l’oreille externe, de l’oreille moyenne et d’une partie de l’oreille interne.
Les sons captés par un micro sont envoyés à un processeur qui les transforme en impulsions électriques. Ces impulsions sont acheminées jusqu’aux électrodes implantées dans la cochlée qui stimulent directement les terminaisons nerveuses du nerf auditif. Les influx nerveux sont envoyés au cerveau qui les décode.
Le dispositif comporte donc une partie externe (Micro, processeur et pièce aimantée) et une partie implantée chirurgicalement (Stimulateur et porte-électrodes). Actuellement l’implant cochléaire s’adresse principalement à des enfants présentant une surdité profonde ou sévère limite profonde bilatérale (les deux oreilles sont affectées). L’implantation est décidée au terme d’un bilan complet, médical, audiométrique, psychologique et orthophonique.
REFERENCES
Site : http://www.cisic.fr/
– “Influence des implantations cochléaires sur le développement socio-affectif de l’enfant sourd” Article de la revue Handicap, N° 99 – 2003
Mis au point aux Etats-Unis par le Docteur R. Orin Cornett en 1967, le “cued speech” s’est d’abord développé dans les pays anglophones et est arrivé en France en 1977, où il a pris le nom de “LPC – langage parlé complété”.
L’ALPC (association pour la promotion et le développement du LPC), a été créée en 1980, à l’initiative de parents d’enfants sourds, soutenus par des professionnels.
Elle est agréée par la Fondation de France et organise des réunions d’information et des sessions de formation à la méthode (à Paris comme en province), des stages d’été et des journées d’études.
Depuis 2002, l’association a modifié la dénomination en “langue française parlée complétée”.
Le LPC permet de distinguer les sosies labiaux et de rendre certains sons ” visibles ” par l’enfant sourd. Il permet de pallier les difficultés inhérentes à la lecture labiale et aide l’enfant sourd à s’approprier pleinement la langue française orale.
On trouvera sur le site de l’ALPC les principes de cette méthode, qui peut être acquise en quelques jours, mais demande un entraînement de plusieurs mois pour que des automatismes se mettent en place et que le codage ne gêne plus le débit de parole et la spontanéité.
Le LPC est utilisée dans les options éducatives qui privilégient l’acquisition du français oral et écrit, dans un contexte d’intégration. Mais elle est aussi utilisée par des établissements qui veulent pratiquer un bilinguisme authentique : français + LPC et Langue des signes.
Une licence professionnelle de codeur est en place depuis septembre 2005 à l’Université Pierre et Marie Curie (Paris 6). En septembre 2006, cette licence sera proposée également à Lyon 1. Pour plus d’information : http://www.alpc.asso.fr/asso02-d.htm ou licencecodeur@wanadoo.fr
ALPC
21 rue des Quatre Frères Peignot
75015 Paris
Tél : 01 45 79 14 04
Courriel : alpc@wanadoo.fr
Site : www.alpc.asso.fr
Le besoin de communiquer provoque la création de l’outil : ne pouvant être acoustique il devient visuel.
Comme toutes les langues, la langue des signes est un outil de communication spécifique à une communauté sourde, permettant de verbaliser tout l’univers physique et idéel concevable par des énoncés construits et dans des actes de parole pertinents.
C’est une langue visio-motrice se démarquant des langues orales de nature audio-phonatoires.
Elle obéit à deux conditions :
-condition spatiale : la production des signifiants exploite les trois dimensions de l’espace.
-condition linéaire : chaque unité de sens se succède dans la chaîne parlée.
La langue des signes possède un lexique riche, varié et potentiellement infini, formé d’unités signifiantes “arbitraires”.
Le caractère iconique souvent souligné, lié à un aspect symbolique de la chose dénotée, relève surtout de la matérialité visuelle de ses signifiants. Chaque signifiant renvoie à un concept et non à un mot de la langue orale du pays.
Les aspects formels
Ces signes se décomposent en unités fondamentales (les chérèmes) en nombre fini : la configuration de la main, l’orientation de la main, son emplacement, le mouvement exécuté par la main ou le bras.
La modification d’un ou plusieurs chérèmes peut entraîner soit un changement de signe, soit une variation flexionnelle, soit une création nouvelle par dérivation.
Cette latitude de commutation paradigmatique des chérèmes assure à la langue des signes une créativité lexicale puissante et économique.
La langue des signes possède un système prosodique propre assuré, non par la voix évidemment, mais par les expressions faciales, les mouvements de tête, l’expiration du souffle, le regard.
Aspects fonctionnels
Les unités lexicales forment des énoncés soumis à des règles morpho-syntaxiques qui sont propres à la langue des signes.
Elle situe ses énoncés dans un temps précis, dans un espace déterminé et peut les référer aux actants fondamentaux de la communication (nos pronoms personnels).
Grâce à tous ses procédés fonctionnels et en utilisant des unités à signifiés abstraits, la langue des signes peut prétendre à une verbalisation authentique des opérations intellectuelles fondamentales qu’offre une langue. Elle permet de juger, d’argumenter, de démontrer, de raisonner.
Elle est une réalité sociale liée à une communauté qui se définit par le handicap de la surdité. Elle se transmet peu par voie héréditaire mais plutôt par les pairs de cette même communauté .
Elle ne se limite pas à un lieu géographique, d’où un caractère presque universel de cette langue même si chaque pays a sa propre langue des signes.
Cette méthode a été conçue et élaborée en 1954 pour l’apprentissage des langues étrangères par le Professeur GUBERINA de Zagreb. Elle fut introduite en France dans les années 1960 dans la pédagogie de l’enfant sourd.
C’est une méthode qui se veut naturelle et qui tend à faire passer l’enfant sourd par les mêmes stades d’acquisition du langage que l’enfant entendant.
Principe
La méthode verbo-tonale repose sur la thèse selon laquelle l’homme n’est pas un ensemble de sens et de fonctions isolées, mais un être beaucoup plus complexe qui fonctionne comme un tout. Avant d’être une méthode constituée de techniques, elle est d’abord une “façon d’être” avec l’enfant qui demande intuition et créativité de la part des éducateurs.
Présentation
La méthode verbo-tonale est globale.
Elle ne considère pas le langage oral comme une succession de mots, mais comme l’expression de l’être tout entier, l’expression des désirs, des refus, des volontés. Le langage est dialogue et mouvement.
Pour l’éducation de l’enfant sourd, la méthode verbo-tonale se veut naturelle ; elle se propose de suivre les stades successifs d’acquisition de l’enfant entendant. Avant de parler, l’enfant entendant s’imprègne de sons, de mots qu’il va reproduire par imitation dans un premier temps ; ensuite ces mots vont prendre une signification précise en fonction de la réponse de l’entourage.
La méthode verbo-tonale se propose d’essayer de reproduire avec l’enfant sourd ce processus naturel d’apprentissage du langage, en apportant le plus grand nombre d’informations possibles. L’idée de base est de donner le maximum d’éléments prosodiques à travers le minimum d’éléments articulatoires et linguistiques afin de rester dans le plaisir.
C’est une méthode polysensorielle qui va se servir des restes auditifs, de la lecture labiale, des vibrations, des émissions spontanées de l’enfant qu’elle va reprendre et encourager et plus pécifiquement des fréquences graves qui sont souvent mieux conservées dans le cas de surdité. Ces fréquences graves sont perçues par le corps entier et la méthode verbo-tonale utilise des vibrateurs placés sur une partie du corps de l’enfant (main, poignet, genou…) pour les transmettre et ainsi travailler le rythme, l’intonation, les bases de la parole.
L’utilisation des restes auditifs qui sont amplifiés, soit par les prothèses auditives de l’enfant, soit par des appareils amplificateurs de type SUVAG qui grâce à des systèmes de filtres permettent de déplacer le champ d’audition dans celui qui correspond aux restes de l’enfant. Cette méthode requiert la participation du corps tout entier qui favorise la perception mais aussi l’émission et cela à travers les activités de rythme corporel, de rythme musical et de graphisme phonétique. La méthode verbo-tonale est une méthode privilégiant le langage oral avec une approche polysensorielle. Elle est dynamique pour les enfants et les praticiens mais elle est aussi exigeante, demandant créativité et intuition. Elle est compatible avec d’autres modes de communication L.P.C., L.S.F.
REFERENCES
Association Internationale pour la métode verbo-tonale
Secrétariat et Comité Scientifique
Mrs.VIŠNJA CRNKOVIC
Secretary of the Association Poliklinika SUVAG
Ulica kneza Ljudevita Posavskog
10 10000 ZAGREB – CROATIA
Courriel : vcrnkov@suvag.hr
Tél.: +385 1 46 29 615 / Fax: +385 1 46 55 166
Site : http://www.suvag.hr/en_menu.htm
Siège Administratif
Association Internationale pour la méthode verbotonale
chez JACQUES BOUCHEZ, vice-president
Quartier St. Joseph
84220 ROUSSILLON – FRANCE
Courriel : jacques-bouchez@wanadoo.fr
Tél.: +33 49 00 57 542
Association des praticiens de la méthode verbo-tonale
Presidente : Monique Roddier-Pouderoux
IRPA, Place Abbé de l´Epée
59790 RONCHIN
La MDPH 94 a édité un document spécifique concernant la surdité
Le projet d’établissement